La situation financière des retraites complémentaires (Agirc pour les cadres et Arrco pour l’ensemble des salariés du privé) est « alarmante » et un relèvement de l’âge légal de départ semble inéluctable. Tel est le principal enseignement d’un rapport de la Cour des comptes sur ces régimes qui doit être rendu public jeudi 18 décembre.
La Cour dénonce notamment les « coûts salariaux » des personnels de ces caisses, « significativement supérieurs » à ceux du régime de base de la CNAV, supérieures de 25 %, en moyenne. La Cour évalue à 15 % le surcout total de la gestion des complémentaires par rapport aux retraites de base, notamment en raison d’une « dérive des dépenses informatiques » destinées à créer un outil de gestion commun entre les caisses. Il pourraient être réduits facilement de 450 millions d’euros à l’hozion 2020.
D’autant qu’en parallèle, les caisses commettent des erreurs dans le calcul des pensions, qui concernent près de 15 % des retraites Arrco liquidées en 2013. Le montant moyen de ces erreurs est de 68 euros par an, selon la Cour, surtout au détriment des retraités. En tout, 265 millions d’euros n’auraient pas été versés correctement en 2013.
Plus grave, les contrôleurs de l’Urssaf ne signalent toujours pas aux retraites complémentaires les fraudes qu’ils détectent parce qu’un décret d’application attendu depuis 2007 n’a toujours pas été publié. Résultat : les retraites complémentaires ne sont pas en mesure de réclamer les retards de cotisations aux patrons indélicats.
Mais pour une fois, un rapport du Conseil d’orientation des retraites (COR) n’est pas aussi inquiétant qu’attendu. Les dernières projections de l’organisme, qui doivent être rendues publiques mardi 16 décembre affirment même que le système de retraites pourrait redevenir bénéficiaire dans la seconde partie des années 2020, à condition que l’économie française redémarre.
Avec une croissance moyenne de 1,5 %, le déficit continuerait même de s’accroître pour dépasser les 30 milliards à l’horizon 2030 (scénario C’). Accusé d’être trop optimiste dans ses précédentes prévisions, le COR a même testé une hypothèse où le taux de chômage resterait autour de 10 % sur le long terme. Dans ce cas, l’équilibre serait rétabli au mieux vers 2035, mais n’interviendrait en réalité probablement pas. Autant dire que si l’économie française reste dans la crise actuelle, avec une croissance atone depuis cinq ans, une nouvelle réforme des retraites pourrait bien s’avérer nécessaire dans les prochaines années. Mais on peut encore attendre un peu avant de décider, estime en substance le COR
Cet équilibre s’explique par le relèvement progressif de l’âge de départ effectif en retraite qui va reculer à 64,1 ans en moyenne d’ici 2040 en raison des dernières réformes. Cela passera également par une chute du niveau relatif des pensions par rapport aux revenus d’activité de 22 % d’ici 2060. « Rien n’empêche, pour des raisons d’équité, de rechercher l’équilibre financier par une autre combinaison que celle qui résulte de cette évolution spontanée », rappelle le COR.
Mais à court terme, le COR confirme que les réformes de 2010 et 2013 devraient permettre de rétablir l’équilibre du régime général des salariés du privé d’ici à 2017, géré par la CNAV. En revanche, le COR confirme la sonnette d’alarme tirée lundi par la Cour des comptes pour les régimes complémentaires. Le besoin de financement de l’Agirc (cadres) et de l’Arrco (ensemble des salariés du privé) devrait en effet être de plus de six milliards en 2018.
La Cour des comptes estime inéluctable de relever l’âge minimum légal dans ces régimes de 62 à 63 ou 64 ans, ce qui risque de désaligner les règles des complémentaires du régime de base. Les négociations, qui s’annoncent houleuses dans ces circonstances, doivent débuter au printemps.
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L’Etat devra en revanche apporter une réponse au nouveau dérapage du coût des retraites de la fonction publique.
Selon le COR, ces régimes vont avoir besoin de près de 3 milliards d’euros supplémentaires d’ici 2018. Jusqu’ici, le gouvernement a toujours soigneusement évité le sujet spécifique des règles spécifique des fonctionnaires en comblant discrètement les déficits avec les deniers de l’Etat.
Source : Jean-Baptiste Chastand - Le Monde